24. Octobre 2025

La clé de la paix

MYANMAR
Au Myanmar, une spirale de violence produit tour à tour victimes et bourreaux. Le pardon est essentiel. Notre responsable de projet fait le point.

Je me rends à Myitkyina. À l'époque de la domination coloniale britannique, cette ville constituait le cœur commercial de la région. Aujourd'hui, elle est en première ligne dans la guérilla qui oppose la junte militaire birmane à plus d'une centaine de milices armées. Certains de ces groupes se battent uniquement pour défendre leur territoire tribal, alors que d'autres se sont regroupés et ont déjà prévu des solutions d'après-guerre entre leurs différentes tribus.

Représailles et victimes civiles
Les villes sont en grande partie épargnées par les combats. Le risque de victimes civiles est trop grand, et les miliciens comme les militaires ont des proches dans les villes. Les combats sont d'autant plus violents dans les forêts. Comme de nombreux miliciens sont originaires des tribus de la jungle, ils savent s'y déplacer et s'y cacher. L'armée mène quotidiennement des attaques contre cet ennemi invisible à l'aide d'avions de combat et de drones, faisant de nombreuses victimes civiles.

Il est difficile de faire la distinction entre civils et miliciens. Vêtus en civils, les membres des milices peuvent se mêler à la population et mener des attaques ciblées contre les infrastructures militaires. Cela conduit à une surveillance considérable dans le pays et à une restriction importante de la liberté de mouvement de la population. En parallèle, les forces de sécurité de la junte se déplacent elles aussi souvent en civil. Dans le nord du pays, il est impossible d'accéder au réseau mobile et même les communications téléphoniques régulières ne sont pas toujours possibles. Toute personne au comportement suspect est interrogée et espionnée. Par conséquent, les fronts se durcissent et l'agressivité augmente.

Pardonner, mais comment ?
Les blessures engendrent la dureté, la dureté engendre la haine, la haine engendre la violence. La violence fait des victimes, et les victimes deviennent bourreaux à leur tour. L'humanité est prise dans ce cercle vicieux depuis la chute originelle, et Dieu seul connaît les milliards de larmes qui ont coulé depuis lors. Le message que j'apporte parle de pardon. Je suis maintenant assis à une table avec notre responsable national et quelques responsables du nord. Que puis-je dire à ces personnes si précieuses pour qu'elles pardonnent ? L'injustice crie vengeance, et les personnes présentes connaissent bien ce que signifient le chagrin et la perte. Je prends mes notes, me remémore la guérison qui découle du pardon et son importance, particulièrement dans ce contexte. Mes auditeurs ne réagissent pas, mais leur silence me convainc que le message est passé, tout comme ma demande pressante de le transmettre activement dans leurs communautés. Avec le pardon, nous remettons notre droit de vengeance entre les mains juœur. Quelle tragédie, quand on pense à ce qui est possible !

La Bible comme boussole
Dans la ville frontalière, la nuit reste exceptionnellement calme. Je n'entends qu'une seule fois le grondement sourd d'une explosion au loin. Cette guerre ne peut être terminée par la force des armes. Le pays est riche en ressources naturelles, et mis à part les intérêts tribaux, de nombreux acteurs étrangers ont tout intérêt à voir ce conflit se terminer. Des discussions sont indispensables pour parvenir à un cessez-le-feu, puis à des structures stables. Les chrétiens du Myanmar doivent plus que jamais utiliser la Bible comme une boussole. Car d'un point de vue spirituel, la réconciliation et l'unité sont nécessaires. Et l'unité est un élément central du royaume de Dieu.

Notre travail au Myanmar

Au Myanmar, ACP concentre la plupart de ses efforts sur la jeune génération.

• Dans certaines régions, jusqu'à 80 % des jeunes Birmans sont toxicomanes. ACP imprime et distribue des Nouveaux Testaments en anglais et en birman, qui servent notamment à ces jeunes de guide de vie et de manuel d'anglais.

• Les orphelins de la tribu Lisu ont la possibilité de grandir dans un orphelinat chrétien et, grâce à un bon niveau scolaire, d'être admis dans des écoles supérieures.

• 70 à 80 élèves d'un village Akha, situé dans le « Triangle d'Or » entre la Thaïlande, le Laos et la Birmanie, reçoivent une éducation primaire. Pour la suite de leurs études, nous leur trouvons, dans la mesure du possible, des places dans des lycées avec bourse, hébergement, repas et encadrement dans la capitale Yangon.

• Le long de la frontière avec la Thaïlande, le centre de loisirs chrétien pour jeunes Royal Rangers est en cours de création. Pour beaucoup de réfugiés mineurs dans les internats, cela devient rapidement un point de repère dans leur quotidien.

• Dans la zone frontalière, ACP apporte également son aide aux personnes déplacées, qui sont des milliers à chercher refuge pour échapper aux bombardements de leurs villages. De plus, des chrétiens de tout le Myanmar sont formés à l'évangélisation et à l'implantation d'églises.